Le penseur traditionnel Arthur C. Brooks a un jour reçu un courriel contenant des commentaires sur son livre récemment publié. Le message débutait par : « Professeur Brooks, vous êtes un escroc ». Bien que le correspondant ait critiqué chaque chapitre du nouveau livre, Brooks dit que son « sentiment premier n’a pas été du ressentiment, mais plutôt de la reconnaissance : “Il a lu mon livre!” Et donc je lui ai écrit en retour... surtout pour exprimer ma gratitude pour son temps et ses efforts. »
En raison des effets positifs de la gratitude sur notre vie intérieure, Brooks nous encourage à en faire « une habitude, indépendamment de ce que [nous] ressent[ons], et pas seulement au mois de novembre, mais toute l’année ». En effet, la reconnaissance est beaucoup plus qu’un simple jour férié dans un pays. L’importance de la reconnaissance est universelle et éternellement significative.
La fête de l’Action de grâce aux États-Unis trouve son origine dans la proclamation de l’Action de grâce par Abraham Lincoln en 1863, au plus fort de la guerre civile — une proclamation qui élève la reconnaissance au rang de vertu en tout temps. Même au milieu d’une guerre qui a fait environ 620 000 victimes, Lincoln a souligné que des bienfaits tels qu’une récolte abondante et un nombre plus élevé de naissances étaient, pour un pays déchiré, des raisons d’être reconnaissant.
Exprimer de la gratitude suppose qu’il y a quelqu’un à qui être reconnaissant. Pour Lincoln et beaucoup d’autres avant et depuis, ce quelqu’un est Dieu. Après avoir énuméré les nombreuses bénédictions du peuple, Lincoln a écrit qu’« aucun conseil humain n’a conçu ni aucune main mortelle n’a élaboré ces grandes choses; ce sont les dons bienveillants du Dieu Très-Haut qui, malgré sa colère pour nos péchés, s’est toutefois souvenu de la miséricorde ».
Pour les saints des derniers jours, la reconnaissance envers un Dieu compatissant est une grâce incontournable. Une Écriture mormone bien connue dit que ceux qui « ne confessent pas la main [de Dieu] en toutes choses » l’offensent. Et, comme tous les chrétiens le savent, quand Jésus a guéri dix lépreux et qu’un seul a rendu grâce, la question simple et perspicace du Christ n’a laissé aucun doute sur son opinion concernant la gratitude. « Les dix n’ont-ils pas été guéris? », demanda-t-il.
Être reconnaissant, c’est s’arrêter, penser et réfléchir à la grandeur de notre existence. Pour les gens de foi, prendre une pause de nos occupations pour considérer nos bénédictions (même les plus banales) est bien plus qu’une idée agréable — c’est un processus transformateur par lequel nos âmes s’élèvent dans l’amour à Dieu qui, en retour, nous dirige vers celui qui a besoin. Que ce soit des mormons qui tendent la main aux victimes des inondations en Louisiane ou aux réfugiés en Italie, des baptistes du Sud qui se rallient pour aider un voisin musulman dont le commerce a été cambriolé et endommagé, ou des congrégations chrétiennes qui enseignent aux enfants dans la communauté que « nous sommes tous des enfants de Dieu et que nous devons tous nous soucier les uns des autres », les gens de foi dans le monde entier témoignent de leur gratitude envers Dieu en s’engageant dans leurs communautés locales.
Il n’est bien sûr pas nécessaire d’être religieux pour être reconnaissant. Le célèbre athée Richard Dawkins a décrit une fois sa « gratitude abstraite » d’être en vie afin d’apprécier les merveilles de l’univers et les beautés de la terre. Pourtant, comme l’explique le rabbin Jonathan Sacks, « il est difficile de se sentir reconnaissants envers un univers conçu sans raison et qui ne se soucie pas de nous ni de notre sort. C’est précisément notre foi en un Dieu personnel qui renforce et oriente nos remerciements ».
Pour les croyants, l’ampleur d’une telle gratitude envers Dieu trouve écho dans les paroles de Joseph Smith : « Un homme rempli de l’amour de Dieu ne se contente pas de faire du bien à sa famille seulement, mais parcourt le monde entier, vivement désireux de faire du bien à tout le genre humain. »